Essai de la LAda 111
L'Argus Automobile (2000)

Lada 111, un break d'exception

D'exception certes, mais pas exceptionnel ! Il cultive les vertus de la marque : rusticité, simplicité et prix imbattable. Pour le reste, il échappe à l'analyse et répond à une autre conception de l'automobile.

Pour ceux qui pourraient en douter, Lada existe toujours. En France, la marque russe a immatriculé plus de 1 800 voitures en 1999 et devrait atteindre 3 000 véhicules cette année. En complément des petites Niva 4 x 4, l'arrivée de la berline 110 a dopé les ventes et celle du break 111 devrait encore accélérer le mouvement.

Certes, ce nouveau modèle ne risque guère de faire la une des magazines. Dans le monde de l'automobile, Lada reste un constructeur d'exception voguant à contre-courant des canons de la modernité. Mais à force d'être furieusement rétro, ses produits finissent par devenir délicieusement kitsch. Et puis une voiture qui de nos jours fait l'impasse sur les porte-gobelets ne saurait être totalement mauvaise. Comme toutes les espèces en péril, la Lada 111 mérite d'être protégée.

D'abord parce qu'elle vaut 52 900 F. Oui, neuve, 52 900 F. Qui dit mieux ? Ensuite, pour ce prix préhistorique, elle offre cinq vraies places, un grand coffre et un moteur digne de ce nom avec ses 70 ch et son injection électronique.

Pour le reste, évidemment, la Lada 111 a du mal à se soumettre à la critique de la raison pure. En retenant les impératifs catégoriques du jugement, elle se dilue rapidement dans la réalité des faits. Si son prix est préhistorique, sa conception et ses équipements aussi. Déjà de série il n' y a pas grand-chose. Et en option encore moins.

Au volant après avoir déconnecté l'antidémarrage - ustensile indispensable au vu des nombreuses tentations que suscite cette voiture -, le premier choc provient de l'absence d'assistance de direction. En ville, il faut jouer les gros bras pour la moindre manoeuvre. Sur route aussi où le train avant, affligé d'une suspension aussi brutale que sautillante, à la fâcheuse tendance de vous attirer inéluctablement vers l'extérieur des virages. Il faut donc souquer ferme pour maintenir un semblant de trajectoire. D'autant que pour se ralentir, on ne peut trop compter sur l'action des freins - pourtant à disque à l'avant - dont l'efficacité est comparable à celle des patins de votre vieux vélo.

Heureusement, il reste des lignes droites bien dégagées où profiter des performances honnêtes du moteur. Sur autoroute par exemple, où la Lada 111 croise sans effort aux vitesses autorisées. Avec un couple maximal atteint dès 2 800 tr/min, on peut même s'offrir le luxe de reprises correctes sans avoir à solliciter la boîte de vitesses. Et c'est tant mieux car la commande ne brille ni par sa douceur ni par sa précision. Le problème de ce bon serviteur, c'est qu'il aime se faire entendre. Dans l'habitacle épanoui du break, il trouve une caisse de résonance à sa mesure et sa sonorité empêche toute conversation au dessus de 100 km/h.

Cela dit, il ne faut pas confondre la Lada 111 avec un break de chasse. Ou alors dans le rôle du gibier. Sans la moindre prétention, elle s'assume parfaitement comme démocratique utilitaire familiale. Qu'importe le bruit, qu'importe le confort pourvu qu'on ait l'espace. Et cet espace, il est bien réel à bord de ce petit break de 4,28 m offrant une place généreuse aussi bien à l'avant qu'à l'arrière. Dans sa fonction utilitaire, la Lada offre même quelques équipements dont le luxe semble incongru dans cet environnement. A commencer par l'ouverture électromagnétique du coffre depuis l'habitacle - un vrai miracle - , ou encore les barres de toit en série comme la banquette arrière fractionnable. En repliant son assise contre les sièges avant et en rabattant les dossiers, elle libère un espace utile convaincant.

Au chapitre des curiosités, on se laissera également séduire par l'extinction temporisée du plafonnier, les fascinantes quatre vitres électriques, à la limite de la faute de goût, ou le verrouillage centralisé des portières - sans télécommande, n'exagérons rien.

Par ailleurs, la Lada break de notre essai jouissait d'une qualité de finition supérieure à celle de la berline 110, notamment au niveau de l'étanchéité de tous les joints de caoutchouc. D'autre part, elle profite d'une ligne moins anachronique dans cette carrosserie que la stricte trois- volumes taillée à la faucille. De là à en faire la voiture idéale, il y a un pas que nous ne franchirons pas.

L'achat militant ayant vécu, la Lada 111 s'adresse à ceux qui cherchent d'abord un prix et méprisent ensuite l'automobile comme vecteur social. A ces différents titres, elle est sans concurrence sur le marché.

Sur le marché du neuf tout au moins, puisqu'il faudra vous tourner vers la cote occasions de L'argus, quelques pages plus loin, pour trouver des breaks dans cette gamme de prix. Lada offre en quelque sorte du neuf au prix de l'occasion. Quant à savoir si la 111 break est elle-même une bonne occase, c'est plus une affaire de conviction que de raison.